fils de l'homme

Fils de l’homme/bar (e) nasha
 
A- En araméen : bar nasha a 4 sens possibles
-         L’homme en général ou les foules
-         Le pronom indéfini « on »
-         bar nasha/Hahu gabra circonlocution pour dire « JE » = « votre serviteur ». « Le Fils de l’homme n’a pas où reposer sa tête = Je n’ai pas de domicile fixe.
-         Le Fils de l’homme de Daniel 7,13 proche du vieillard représentant YHWH
 
B- Les Evangiles jouent avec les 4 sens
Ceci respecte l’identité de Jésus qui doit rester secrète pour ne pas éveiller la jalousie des anges (Gn 6,2) ou de Satan (Jb 1,6 ; Za 3) (Sigmund.Mowinckel He that cometh Paperback 2005). Cela correspond à la recommandation de discrétion chez Marc quand Jésus fait montre de sa « Gloire » (Présence de Dieu en Lui). (Mc 9,9) ; (Mt 17,9)
 
Exemple d’utilisation des 4 sens dans les Evangiles :
La confession de Pierre à Césarée dans les Evangiles a un fort substrat araméen :
« La chair et le sang », « les portes de l’Hades », « lier délier » (Mt 16, 17-19) (JM.Van Cangh, Mt 16 Congrès ACFEB Lille)
Dans ce contexte, la question de Jésus : « Que disent « bene nash » qu’est « bar nash » ? est traduite dans les différents Evangiles en grec :
-         Mt 16,13 « Que disent « les hommes » qu’est le « fils de l’homme » ?
-         Mc 8,27 Que dit-« on » que « je » suis ?
-         Lc 9,18 : Que disent « les foules » que « je » suis ?
Les quatre sens de « bar nashah » sont utilisés dans la traduction grecque des Evangiles. Le seul à faire difficulté est celui de Dn 7,13. Essayons d’en comprendre la portée en retraçant son histoire.
 
C- De l’Alliance de pierre à l’Alliance de chair 
Comment un « Fils d’homme » peut-il être à la fois « auprès de Dieu » et « auprès des hommes » en Jésus ? Quelle image de l’Alliance cela suppose-t-il ? Comme toujours dans la bible le premier jalon est celui de la parole sinaïtique.
 
1.      Jr 31,31ss : « Dieu va conclure une Alliance nouvelle…non pas celle du Sinaï…Elle a été rompue…Je mettrai ma Torah au dedans d’eux (beqirbam) et je l’écrirai sur leurs cœurs (‘al libbam) et je serai pour eux Dieu et eux seront pour moi peuple ».
2.      Ez 36,25 : « Je répandrai sur vous une eau pure et vous serez purifiés de tous vos péchés et de toutes vos souillures je vous purifierai. Et je vous donnerai un cœur nouveau (Lev hadash) et un Esprit nouveau je mettrai au dedans de vous (beqirbekem) et j’enlèverai le cœur de pierre (lev ha’even) de vos chairs (basar) et je vous donnerai un cœur de chair (lev basar). Et mon Esprit je le mettrai au dedans de vous (beqirbekem) et je ferai que selon mes lois vous marchiez et mes coutumes vous gardiez et pratiquiez.
Si l’on compare les deux formulations :
1.      Chez Jérémie, il s’agit bien de la Torah qui sera « au dedans d’eux » et « inscrite sur les cœurs ». 
2.      Chez Ezéchiel, après purification des péchés, il y aura un cœur nouveau et Esprit nouveau au dedans d’eux. L’Alliance sur la pierre était avec Jérémie perçue comme Torah écrite sur le cœur. Elle peut s’appeler « un cœur de pierre ». Ce cœur de pierre, sera ôté de la chair pour devenir un cœur de chair. Ce ne sera plus une écriture sur la pierre qui fera le cœur de l’homme, mais une incarnation de la Torah, due à l’Esprit nouveau qui est donné au dedans d’eux.
 La Parole de Dieu écrite sur la pierre au Sinaï, s’est inscrite « sur le cœur » avec Jérémie. Elle s’inscrit « dans la chair » grâce à la vie nouvelle de l’Esprit.
 
D- Avec le monothéisme d’Amour
Après Ezéchiel la découverte du monothéisme va encore approfondir la démarche. Israël, fidèle à l’Alliance, a opté pour le Dieu d’Amour comme seul Dieu du ciel et de la terre (et non le Dieu le dieu perse : Sagesse ou Lumière ou Mazda).
Il en résulte que la Parole d’Amour de Dieu est première par rapport à la lumière qui n’est plus que la première des créatures (Gn 1,2). Elle est en outre, comme tout amour, capable de transfigurer la créature faite à son image (Gn 1,28)
La Torah comme Parole d’Amour de Dieu devient préexistante au monde (Si 24,1à23 ; Ba 4,1). Pourquoi cette Parole d’Amour ne pourrait-elle pas être un intermédiaire entre Dieu et l’homme. Elle est de Dieu et de l’homme. Ce qui supposerait que l’Amour (ou l’Esprit/vie de Dieu) peut transfigurer l’un et l’autre en leur image réciproque. La théologie d’Isaïe 2 et 3 en renforce l’hypothèse, elle qui en permanence accouple les expressions de salut et d’Amour avec les expressions de création (Is 40,21-26 ; 42,5-7 etc.).
Peut alors se poser la question d’un intermédiaire en Dieu pour le bien et le bonheur comme on va aussi voir un intermédiaire en Dieu pour le malheur et le péché avec les Fils de Dieu de (Gn 6,2) et avec le Satan de (Jb 1,6s ; Za 3,1-7).
 
E- Le martyr et le Fils de l’homme
Cet accent mis sur la capacité de transfiguration de l’Amour créateur en Dieu va ouvrir un nouveau chapitre de réflexion dont le prophète Daniel se fera l’écho. Avec la persécution d’Antiochus IV Epiphane, ce qui poussera les martyrs à accepter le don de leur vie à Dieu c’est la conviction que si Dieu est Amour créateur, il ne peut pas laisser loin de lui ceux qui donnent pour Lui leur vie dans le martyr (2 M 7,27-29). Le soutien de la mère à son dernier enfant martyr est symptomatique à cet égard : il porte tout à la fois sur la puissance créatrice et l’Amour en assimilant création et procréation. De même que l’homme naît d’une semence infime, de même Dieu peut créer « de rien ». Et s’il peut dans son Amour créer « de rien », il peut aussi ressusciter un être qui est mort par amour pour Lui.
 Dans son ch.13, Daniel développe la perspective. De même que le martyr peut se trouver en Dieu tant est grande la transfiguration que l’Amour de Dieu y opère, de même le mouvement inverse devient envisageable. Dieu peut avoir en Lui un « Fils d’homme » transfiguré comme il prend en Lui le martyr ressuscité. Les martyrs de (Dn 7,25) seront les vivants pour l’éternité du verset suivant (Dn 7,26s). Et si l’amour de Dieu peut faire que les martyrs subsistent en Dieu, il peut aussi faire que ce même Amour prenne corps en Lui dans un « Fils d’homme » qui demeure auprès de Lui (avec les martyrs) (Dn 7,13). Il ne reste plus qu’à espérer que ce « Fils d’homme » en Dieu prolonge le « cœur de pierre » de sa Torah par le cœur de chair de son incarnation. 
Ceci se réalise dans le prologue de Jn 1 : "Au commencement était le Verbe, et le Verbe était tourné vers de Dieu, et le Verbe était Dieu. [La Parole au Sinaï était Dieu tourné vers nous et nous vers Lui. Avec Jean Baptiste le Verbe s'est encore rapproché de nous et nous de Lui…] Et le Verbe s'est fait chair et il a habité parmi nous”. 
                                                          

Les publications de référence :

Les Seuils de la Foi

Editions Parole et Silence et Université Catholique de Lille

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